HDR Stéphane Binet

BINET Stéphane présentera ses travaux en vue de l’habilitation à diriger des recherches intitulés :
‘Réserve régulatrice des aquifères et impacts anthropiques: implications en termes de transferts d’eau, de carbone et de contaminants vers les rivières’

Devant le jury constitué par les personnalités suivantes :
- Aquilina, Luc – Professeur, Université de Rennes
- Dassargue, Alain – Professeur, Université de Liège
- Gaillardet, Jérome – Professeur, Institut de Physique du Globe de Paris
- Laggoun, Fatima – Directrice de recherche, CNRS, Orléans, Présidente du jury
- Massei, Nicolas – Professeur, Université de Rouen
- Probst, Anne – Directrice de recherche, CNRS, Toulouse

Résumé des travaux:

Aujourd’hui, la compréhension du fonctionnement de la zone critique (interface atmosphère-solzone-non saturé-aquifère) et de ses réactions face aux changements environnementaux (impacts anthropiques et changement climatique) est un enjeu majeur pour l’homme qui y vit, en tire ses ressources et en subit les aléas. Dans cette zone l’eau, le principal agent de transport, est majoritairement stockée sous terre (représentant 30% des réserves d’eau douce continentale). Le milieu souterrain participe donc à la régulation du cycle de l’eau, jouant le rôle de tampon lors d’événements extrêmes et de soutien durant les étiages. Indirectement, cette réserve régulatrice affecte les cycles du carbone et des contaminants par des effets de dilution et/ou d’atténuation (dénitrification, pouvoir tampon etc…). Elle participe au maintien des processus écologiques et à la préservation de la biodiversité. Sous terre, les discontinuités augmentent la surface de contact de l’interface surface/souterrain. Les milieux discontinus comme les aquifères karstiques, les tourbières et les milieux fracturés sont des systèmes où les mélanges d’eau sont exacerbés, faisant de ces lieux des hots spots en termes de régulation des flux d‘eau et de carbone vers les rivières.

Quelles sont les facteurs qui contrôlent ces mélanges d’eau lors d’une crue? Évoluent-ils face aux changements environnementaux ? Ces questions nécessitent une approche couvrant plusieurs échelles temporelles, de la dynamique d’une crue (horaire) à celle des changements climatiques (décennie ou siècle). Ce travail est rendu possible grâce aux bases de données historiques des observatoires et/ou grâce à la mise en place de nouveaux indicateurs de l’évolution de cette réserve et de sa recharge.

Pour étudier ces mélanges et les réactions à l’interface surface/souterrain, mon travail porte sur deux aspects, le développement de nouvelles méthodes d’estimation de l’âge de l’eau en utilisant des traceurs environnementaux et la mise au point d’outils de modélisation couplée hydro-chimique nécessaires à l’interprétation quantitative de ces données. Ces outils et méthodes ont été appliqués à différents milieux afin de quantifier les mélanges d’eau et de mettre en évidence les mécanismes qui contrôlent ces échanges.

Les volumes d’eau stockés dans la réserve régulatrice sont le résultat d’un équilibre complexe entre propriétés (intrinsèques) hydrodynamiques des roches et les flux (conditions aux limites) traversant ces systèmes. Il en découle que les stocks de la réserve régulatrice sont des stocks transitoires, sensibles aux changements enregistrés en surface, comme l’anthropisation (drainage, occupation du sol) et aux cyclicités du climat.

Concernant les flux de matières, les capacités de stockage de ces systèmes retardent et/ou atténuent l’impact des contaminations vers l’aval. La zone de mélange crée des gradients géochimiques provoquant des réactions comme la production de carbone organique dans les tourbières ou de carbone inorganique dans les systèmes karstiques. Les observations à la sortie de ces systèmes montrent que les acides carboniques du sol, les fertilisants agricoles, les pluies acides, la matière organique particulaire des rivières réagissent au contact de la roche. Ces réactions sont toutes limitées par la quantité d’eau de surface apportée vers le milieu souterrain. Le flux d’eau à l’interface surface/souterrain contrôle donc les flux de carbone vers les rivières.

Ce travail devrait permettre d’intégrer pleinement le rôle des eaux souterraines dans les cycles du carbone et des contaminants en contexte de changements climatiques, mais aussi d’un point de vue plus opérationnel d’améliorer nos méthodes d’estimation de la vulnérabilité, de protection de la ressource en eaux souterraines et d’adaptation face au changement climatique.